Par Claudia Pelletier, DBA, professeure en systèmes d’information
École de gestion/Institut de recherche sur les PME,
Université du Québec à Trois-Rivières
Le 29 septembre 2017
Big data, intelligence artificielle, industrie 4.0, blockchain, biométrie, Internet des objets, réalité augmentée et autres technologies de l’information (TI), vous connaissez? Probablement, puisque ces listes font l’objet de publications récurrentes dans la presse techno et d’affaires, particulièrement en début d’année. 2018 ne devrait pas y échapper. Ces tendances et nouvelles applications technologiques vous seront aussi probablement présentées comme des solutions applicables à toutes les entreprises, taille et secteurs confondus, ainsi que comme des projets à mettre en branle de toute urgence sous peine de grands malheurs. Remettons certaines choses en perspective et posons les bonnes questions.
Il est indéniable que le virage numérique constitue un incontournable, plus particulièrement pour les petites et moyennes entreprises (PME). Il peut toutefois être coûteux et décevant de constater que les efforts financiers et humains ne procurent pas les résultats attendus. C’est malheureusement le cas d’environ 70 % des projets technologiques. Que doit-on retenir de cette situation? Que faire face à l’urgence d’agir et la tentation d’adopter la dernière tendance dont parle le journal du jour?
L’essentiel est d’abord d’assurer la cohérence du projet en réfléchissant au préalable aux objectifs d’affaires que l’implantation technologique envisagée vise à soutenir : Pourquoi ce projet est-il important dans l’entreprise et que soutiendra-t-il précisément? Où dois-je porter mon attention en priorité? Sur l’écosystème d’affaires? Les manières de faire et les activités de gestion? Les opérations? 1. En d’autres mots…
Trop souvent, on débute et limite la réflexion au choix de la technologie elle-même sur les plans matériel et logiciel (Quoi?). Cela, sans questionner les véritables fondements ainsi que les impacts du projet qui sont d’abord et avant tout des enjeux managériaux et organisationnels (Pourquoi? Où?). Autrement dit, tout comme l’iceberg, la TI ou l’outil technologique ne sont que la partie visible d’un projet plus complexe, dont on néglige trop souvent la cohérence globale, autant que son ampleur.
Résistance aux changements, dirigeants et entrepreneurs peu impliqués dans ce qui est considéré comme un projet strictement technique, spécialistes TI et consultants payés à gros prix avec lesquels il est souvent très difficile de communiquer faute d’un langage partagé, culture peu axée sur la collaboration, structure organisationnelle fonctionnant en silos, politiques internes dépassées et mal adaptées, employés mal formés et peu enclins à l’expérimentation, vous connaissez?
Conclusion : « Le principal piège dans lequel les dirigeants sont les plus susceptibles de tomber en matière technologique n’est pas de mal comprendre la transformation numérique, mais bien d’en faire un problème informatique plutôt que d’affaires » (traduction libre tirée d’une interview McKinsey & Company, août 2017).
1À ce sujet, vous pouvez consulter les IT Trend Studies de la Society for Information Management (SIM) qui mène chaque année une enquête de type « Qu’est-ce qui vous tient éveillé la nuit? », auprès des responsables TI d’entreprises nord-américaines de différents secteurs d’activités. Vous y constaterez que ce n’est pas le buzzword du moment qui revient année après année, mais bien des préoccupations dites de gestion, telles que l’alignement stratégique des TI et des affaires, la sécurité et la vie privée, l’agilité et la flexibilité, etc.