Proposer des espaces de travail habilitants: le défi de l’entreprise

Par Pierre-Yves Therriault, Ph.D., erg., Professeur, Département d’ergothérapie de l’UQTR

Dans le contexte de la mondialisation, l’entreprise d’aujourd’hui se doit d’être de plus en plus performante. Cependant, il est constaté un peu partout à travers le monde que malgré les nombreuses possibilités technologiques (robotisation, automatisation, web, etc.) trop souvent associées à la production, les entreprises d’aujourd’hui restent en perte de performance particulièrement parce que l’emphase des transformations concerne peu l’investissement de la santé et de la sécurité de la main-d’œuvre.

Un accident ou une absence bouleverse le fonctionnement régulier d’une entreprise. Il faut alors revoir l’atteinte des objectifs, décaler les délais de production et de livraison et évaluer les impacts financiers. Les coûts générés sont souvent importants et les répercussions grandes. Dans leurs analyses, les travaux et les interventions menés en entreprise pointent souvent que dans une réorganisation, les décideurs oublient de considérer l’humain comme élément central de la performance.

Au-delà de l’obligation législative, veiller à la santé et à la sécurité des employés constitue un avantage certain en matière de compétitivité. La tendance actuelle montre que le fait de considérer l’épanouissement des travailleurs doit également faire partie des priorités d’une entreprise innovante. Ces cibles sont de plus en plus associées à l’augmentation de la productivité de l’entreprise.

Pourquoi faire ?

Pour améliorer un contexte de travail, la collaboration entre les acteurs (direction, syndicat, gestionnaires, employés, etc.) doit être prônée. La collaboration c’est l’acte de travailler ou de réfléchir ensemble pour atteindre un objectif. Cette dernière favorise des approches fondées sur la prise de décision partagée. En ce sens, les différents acteurs de l’organisation se mobilisent pour mieux cibler les problèmes et les facteurs de risque.

Quoi faire ?

Les employés ont tendance à reproduire ce que l’organisation leur fait vivre quotidiennement. Il est important que la direction s’engage fortement dans ses décisions et donne l’exemple dans son comportement au quotidien. Pour donner les bases à un climat de travail habilitant, il faut libérer la parole, c’est-à-dire que les employés peuvent parler à leur gestionnaire des problèmes en matière de santé et de sécurité sans que ceux-ci soient perçus comme une plainte ou une nuisance. Le discours des travailleurs doit être perçu comme une contribution essentielle à la qualité d’un milieu de travail sain.

Comment faire ?

La création d’un espace de travail habilitant constitue une solution simple. Cet espace habilitant correspond à un lieu qui permet à tout travailleur de participer, de s’engager et de transformer la vie collective, dans la mesure de ses capacités, afin qu’il puisse se réaliser et s’émanciper pleinement au travail. Ce type d’espace respecte le droit de vivre des occupations enrichissantes qui font « sens », le droit de participer à une variété de tâches contribuant à la santé et à l’inclusion sociale, le droit d’exercer son autonomie et son pouvoir d’agir à travers des choix occupationnels, et le droit à des privilèges égaux pour s’engager dans des tâches variées. Pour créer de tels espaces de travail, il faut, entre autres, outiller les entreprises afin qu’elles définissent simplement les problèmes, qu’elles implantent un climat de collaboration et qu’elles mettent en place une dynamique de la reconnaissance sincère.

Lorsque la santé des travailleurs va bien, cela signifie que le travailleur entretient de meilleures relations avec son équipe de travail, et par ricochet, que l’équipe d’employés contribue mieux à l’atteinte des objectifs de l’organisation.